Le déroulement de l'instance

L'instance est la situation juridique particulière qui existe entre les parties depuis le moment où la demande en justice est formée jusqu'au jour où le jugement sera rendu.

Tout le temps que dure l'instance, l'affaire sera instruite. Ceci signifie qu'avant d'être appelé à l'audience pour y être jugé, on procède à :

L'affaire est mise en état d'être jugée. C'est là que l'on retrouve devant le Tribunal de Grande Instance un Juge à la fonction essentielle à savoir le Juge de la Mise en Etat.

Celui-ci va durant toute l'instance surveiller son bon déroulement.
Lorsque l'affaire apparaît en état d'être jugée, le Juge de la Mise en État prononce l'ordonnance de clôture (à partir de là il n'est en principe plus possible de déposer écrits et pièces) et fixe l'affaire pour plaidoirie.

Il est désormais exigé d'établir avant clôture des "conclusions récapitulatives" puisque depuis le décret du 28/12/1998 seules les dernières conclusions peuvent désormais être prises en compte par le Tribunal.

En ce qui concerne la fixation pour plaidoirie, celle-ci interviendra :

Devant le Tribunal d'Instance ou devant le Juge de Proximité, il n'existe bien entendu pas de Juge de la Mise en État, mais tous ces échanges de pièces, écrits, se feront entre chaque date d'audience fixée par le Juge qui, lui aussi, surveille le bon déroulement de la procédure.

Il convient à présent d'étudier les grands principes qui régissent l'instance.

SECTION 1 - PROCEDURE ACCUSATOIRE ET PROCEDURE INQUISITOIRE

Une procédure est dite accusatoire quand la loi abandonne l'instruction de l'affaire à la diligence des parties.
Le Juge a là simplement un rôle d'arbitre.

A l'inverse une procédure est dite inquisitoire quand le Juge dirige lui-même l'instruction en vue de découvrir la vérité.

De nos jours il n'est plus permis de dire que tel ou tel contentieux est exclusivement accusatoire ou inquisitoire.

Selon le type de contentieux, l'un ou l'autre des caractères est plus ou moins marqué.

I.- CONTENTIEUX PRIVE

Devant les juridictions civiles, la procédure est essentiellement accusatoire.

On enregistre cependant un déclin du principe avec l'instauration du Juge de la Mise en État chargé de suivre la procédure.
Désormais l'affaire n'est plus exclusivement la chose des parties, puisque le Juge de la Mise en État fixe le calendrier de l'affaire.
Il peut provoquer un débat sur une mesure d'instruction, prendre des renseignements officiels, enjoindre de conclure ou de produire telle ou telle pièce etc .. ceci jusqu'au prononcé de l'ordonnance de clôture.

II.- CONTENTIEUX REPRESSIF

Dans le contentieux pénal, la procédure est fondamentalement inquisitoire et ce essentiellement sous l'égide du Juge d'Instruction.

Cependant on observe à l'heure actuelle que les parties (prévenu ou partie civile) peuvent avoir un rôle plus actif en demandant notamment des mesures d'instruction complémentaires, des confrontations, des contre-expertises etc ..

III.- CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

On admet communément qu'il s'agit d'une procédure de type inquisitoire.

La direction du procès appartient au Juge qui fixe à chacune des parties les délais pour conclure.

Il joue également un rôle dans l'administration de la preuve en pouvant par exemple contraindre les parties et plus particulièrement l'administration à produire pièces et documents.

Il est de même fondamental d'avoir à l'esprit que la solution du procès administratif est très orienté par les conclusions du Commissaire du Gouvernement, lequel étudie la solution à donner au litige indépendamment même des arguments qu'ont pu soulever les parties.

SECTION 2 - PROCEDURE ECRITE OU PROCEDURE ORALE

Dans le cas de la procédure écrite, le Juge se prononce sur pièces c'est-à-dire sur les conclusions et mémoires qui lui ont été soumis.

A l'inverse dans l'hypothèse d'une procédure orale, les parties s'expliquent verbalement.
C'est ici que l'on relève le rôle prépondérant de la plaidoirie.

Les deux systèmes sont combinés à des degrés divers.

I.- DANS LE CONTENTIEUX PRIVE

A) Devant le Tribunal de Grande Instance et les Cours d'appel

La procédure est essentiellement écrite : assignation, conclusions etc..
On retrouve l'oralité le jour de l'audience de plaidoirie, mais celle-ci se résume de plus en plus à une brève synthèse des écrits.
De plus il est formellement interdit d'y ajouter des moyens et arguments nouveaux à l'occasion de l'audience de plaidoirie.
Le procès est figé par l'ordonnance de clôture à la fin de l'instruction de l'affaire dans le cadre de la Mise en État.

B) Devant les juridictions d'exception (ou plutôt à compétence spéciale)

La situation est toute autre devant les Tribunaux d'Instance, Conseils de Prud'hommes, etc ..
Devant ces juridictions, la procédure est orale, mais les écritures ne sont bien entendu pas exclues et la demande introductive d'instance doit être consignée par écrit.

C) Devant la Cour de Cassation

La procédure est fondamentalement écrite et la Cour statue sur les mémoires déposés.
Il existe simplement une possibilité de formuler de brèves observations orales à l'audience, mais ceci est extrêmement rare.
Cette manière de faire peut se comprendre puisque la Cour de Cassation statue exclusivement en droit.

II.- DANS LE CONTENTIEUX REPRESSIF

A) Instruction préparatoire

Lorsqu'il y a instruction, la procédure à ce stade est écrite.
Il faut cependant avoir à l'esprit qu'il y a toujours un mélange d'écrit et d'oralité puisque l'on peut fort bien également déposer des conclusions écrites devant les juridictions répressives tout comme d'ailleurs devant les tribunaux à compétence spéciale (Conseil de Prud'Hommes, etc.).
Dans bien des hypothèses, cela est même conseillé.

B) Devant la juridiction de jugement

Là, la procédure est orale et c'est devant ces juridictions que l'on relève le rôle prépondérant de la plaidoirie.

Il faut cependant avoir à l'esprit qu'il y a toujours un mélange d'écrit et d'oralité puisque l'on peut fort bien également déposer des conclusions écrites devant les juridictions répressifs tout comme d'ailleurs devant les tribunaux d'exception.

Dans bien des hypothèses, cela est même conseillé.

III.- DANS LE CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

Devant les juridictions de l'ordre administratif, la procédure est écrite.

Le Juge statue sur mémoire. Cependant les parties peuvent présenter de brèves observations orales. Il n'est toutefois même pas nécessaire de se présenter à l'audience au cours de laquelle l'affaire sera examinée.

SECTION 3 - PROCEDURE CONTRADICTOIRE ET PROCEDURE PAR DEFAUT

En principe, tout jugement est le résultat d'une confrontation entre les parties en cause et ce dans le respect du principe du contradictoire (discuter, échanger des mémoires, contredire les arguments opposés, connaître les pièces etc...).

Ce principe du contradictoire s'impose aux parties tout comme au Juge qui doit soumettre à la discussion tout moyen nouveau qu'il viendrait à découvrir.

Ainsi lorsque le Juge entend relever d'office un moyen, il doit en principe réouvrir les débats pour permettre aux parties de s'expliquer.

Le respect de ce principe est simple lorsque les parties comparaissent devant le Tribunal mais qu'en est-il si le défendeur ne comparaît pas ?

I.- APPLICATION CONCRETE DU PRINCIPE DE LA CONTRADICTION

A) Le défendeur doit être informé de l'introduction d'une instance à son encontre

Il en sera informé par l'assignation ou la signification de la demande

.

Il doit de surcroît avoir le temps de préparer sa défense.
Le délai minimum est de quinze jours.

Cependant, en référé, les textes ne fixent pas de délai minimum mais parlent d'un délai suffisant, lequel est laissé à l'appréciation du Juge.

Depuis le décret du 28/12/1998, l'information dès le stade de l'assignation est désormais plus complète puisqu'il faut fournir en annexe de l'assignation la liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée, et celle-ci doit de surcroît comprendre précisément les moyens en fait et en droit.

B) Durant l'instruction de l'affaire

Durant toute l'instruction de l'affaire, les mémoires, pièces etc.. doivent être échangés.

On ne trouve bien entendu pas le même principe au niveau de l'instruction en matière pénale, mais on a vu qu'il existe une certaine évolution.

C) Le Tribunal ne peut fonder sa décision que sur des pièces et arguments échangés et débattus

Ainsi le Juge ne saurait se fonder sur des investigations et connaissances personnelles.

II.- LE DEFAUT DE L'UNE DES PARTIES

Alors que la situation normale correspond à un jugement contradictoire rendu après un échange entre les différentes parties au procès, il arrive que l'une des parties fasse défaut.

Ceci correspond à la situation où une partie, bien que régulièrement appelée, ne comparaît pas.

Dans cette hypothèse, le jugement sera soit réputé contradictoire (la partie a été régulièrement touchée, mais ne comparaît pas), soit par défaut.

En semblable hypothèse, la partie défaillante va-t-elle nécessairement perdre le procès ?
N'existe t-il pas dans cette hypothèses des voies de recours spéciales ?

A) Perte du procès par la partie défaillante ?

Bien qu'une partie défaillante court un grand risque d'être condamné, on ne saurait pour autant considérer qu'elle perde nécessairement le procès en pareil cas.

En effet, le NCPC prévoit qu'une décision doit être rendue sur les seuls éléments fournis par la partie demanderesse.

Autrement dit, la carence d'une partie ne dispense pas le Juge d'instruire l'affaire avec le même scrupule et de rechercher si la prétention du demandeur est réellement fondée et recevable.

Plus particulièrement le Juge devra scrupuleusement examiner les pièces du demandeur.

B) Organisation d'une voie de recours spécial

Il s'agit de l'opposition.

La partie défaillante saisit le même tribunal que celui qui lui a donné tort pour lui demander de rétracter sa décision et de juger l'affaire une seconde fois.

L'exercice de cette voie de recours est cependant enfermé dans des conditions très strictes : Il faut que le jugement ne soit pas susceptible d'appel.

Si la voie de l'appel est ouverte, il appartient au défaillante d'interjeter appel.

Il faut également que la citation à comparaître (l'assignation) n'ait pas été délivrée à la personne même de la partie défaillante.

Il s'agit par exemple des significations à Mairie, à un voisin etc...

Dans le contentieux répressif la voie de l'opposition est également ouverte à la condition que la citation n'ait pas été délivrée à personne.

SECTION 4 - PROCEDURE PUBLIQUE ET PROCEDURE SECRETE

Le principe est celui de la publicité de la justice. L'accès au prétoire doit être largement ouvert à toute personne afin que le public soit en mesure d'exercer un contrôle virtuel sur la manière dont la justice est rendue.

Selon la Déclaration des Droits de l'Homme : "Toute personne a le droit à ce que sa cause soit entendu équitablement et publiquement par un juge indépendant et impartial".

Le principe de la publicité est cependant variable selon les phases du procès.

I.- Absence de publicité lors de l'instruction

En matière civile, le principe n'a jamais été discuté.

Tout le travail préalable dans le cabinet du Juge (il s'agit du Juge de la Mise en État) doit se faire sans publicité.

En matière pénale, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète, ceci dans l'intérêt de la poursuite et dans l'intérêt du prévenu.

Pour certains, il y aurait là une atteinte au droit de la défense.

II. Publicité des débats oraux

On retrouve le principe de publicité.
Les débats sont publics devant toutes les juridictions.

Il existe cependant des dérogations :

III.- La décision

A) Le secret du délibéré

Lorsque l'affaire est mise en délibéré, les juges composant la formation de jugement délibèrent entre eux sur les mérites respectifs des prétentions soumises.

Le but de ce secret du délibéré est de soustraire le juge à toute pression extérieure.

Cette notion du secret du délibéré est également inhérent à la notion de collégialité.

C'est la juridiction dans son entier qui rend la décision, de sorte que l'on n'a pas à connaître l'avis de tel ou tel juge la composant.

Cette notion de collégialité est actuellement totalement battue en brèche depuis que les affaires sont de plus en plus jugées par juge rapporteur, voire un juge unique.

B) Le prononcé de la décision

En principe, la décision est lue en audience publique.

En pratique, ceci ne se pratique plus, si ce n'est devant le Conseil de Prud'Hommes où, au début de chaque audience, on assiste à la lecture des délibérés au jour dit.

Il en est de même devant les juridictions répressives.

La défense à l'action | Retour en haut de page | Le jugement et les voies de recours